La prochaine fois, je prendrai le bateau...
Tel Christophe Colomb, je compulse frénétiquement les antiques cartes de Ptolémée dans l'espoir de trouver la route incognita qui permettra de relier maritimement le Bénélux à l'Hélvétie.
Combien de conquis'traders n'ont-ils pas rêvé de trouver cette golden route des flux en liquide qui permettrait de relier ni vu, ni connu, les places financières de Bruxelles à Genève?
Quant à moi, je ne prendrai pas le chemin de l’évasion fiscale pour cause de manque de cash flow sur mon bank account mais je pense avoir trouvé la nouvelle route de la d'inde pour y passer Noël :
D'abord, je réquisitionne Gwenvidik à Dunkerque, j'installe au préalable des toilettes et j'affronte la mer du Nord en direction de Rotterdam et de l'estuaire du Rhin. A ce moment-là, couic, je coupe le mât et recouic, je rétrécis la quille d'un bon mètre et remonte le Rhin d'Allemagne, en faisant fi du chant de la Lorelei, jusqu'en Suisse. De là, je rerecouic encore la quille et bifurque sur le fleuve Aar qui se déverse dans le lac de Bienne. Par des canaux, je passe successivement du lac de Morat au lac de Neuchâtel. Cap vers le sud du lac où j'abandonne lâchement Gwenvidik aux mouettes. Je sors le canal de sauvetage et remonte le canot de la Thielle en pagayant entre les cygnes jusqu'en plein coeur d'Yverdon.
Ouf, terre ferme et château sans vache en vue ! On est arrivé à destination mon capitaine.
Tout ça devrait grosso modo me prendre moins de temps qu’un Bruxelles-Genève en avion sur Easyjet, « The Best Way To Fly In Europe » comme ils disent dans leur dépliant orange. C'est bien la technologie, les voix célestes des speakerines du ciel et les kilomètres de tapis roulants de Zaventem Aéroport pour vous éviter de trop brûler vos précieuses graisses de cellulite, mais voilà, c'est sans compter sur l'infiniment petit, sur le H1N1 de l'aéronautique, bref sur le terrasseur d'avion au sol, j'ai nommé : le petit, l'innocent flocon de neige.
Vous avez d'un côté l’aéronautique, fleuron de l'industrie et du génie humain avec sa flopée d'ingénieurs, ses scandales EADS, son airbus et ses bénéfices vertigineux et de l'autre côté le mignon petit flocon du neige qui, quand tu descendras du ciel, te clouera au sol des avions par milliers...
Tout-à-fait entre nous, j'aime bien l'idée qu'un infiniment petit foute la pâtée à l'arrogante armada aérienne humaine. Ca remet chacun à sa juste place... sauf que cette fois j'avais la place n° 34 dans l'Airbus A380 à destination de Genève. Du coup, j'aimais nettement moins le concept...
Oh marin, toi qui a l'habitude de te faire humble devant le chant des tempêtes océanes, de courber l'échine à chaque fois que la mer se cambre et se cabre, de te laisser aller au ressac avec une infinie résignation, toi qui as la patience des hommes d'avant le notebook, toi qui n'as pas d'horaire hormis celui des marées, pas de correspondance à prendre, d'impératif de rentabilité, donne-nous aujourd’hui un peu de ta sagesse millénaire afin que nous ne soyons plus si pressés et arrogants. Amen.
Revenons à nos bouquetins : le problème avec la Suisse c'est que c'est le bunker de l'Europe, un pays éminemment difficile d'accès :
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soit vous arrivez à franchir les Vosges et le Jura en plein hiver avec vos pneus d'été et alors le plus difficile reste à faire, passer au travers de la frontière qui est d'une très sélective étanchéité ;
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soit vous choppez Gwenvidik et couic par trois fois, vous le raccourcissez par le haut, par le bas et vous vous aventurez sur une route maritime encore inexplorée ;
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ou, mais c'est la pire alternative, vous grimpez dans un avion orange.
Sachez que si vous optez pour cette dernière solution aérienne, il vous faudra affronter de grands dangers, tels que de formidables tempêtes de neige, des troupeaux de passagers hagards au bord de la crise de nerfs, la police anti-émeute en cas d'annulation de vol, jouer plusieurs fois au jeu amusant de « qui c’est qui qui n’est pas là ? » qui consiste à chercher parmi les passagers quelqu'un qui n'a jamais embarqué et puis à la fin du jeu chacun doit montrer sa carte d'identité car c'est toujours rigolo de voir la tête des gens avec 10 ans de moins... Et puis, il y a aussi un vrai suspens : on décolle, on décollera bientôt et puis on décolle plus et puis non, on décolle, on décollera bientôt, etc...
Surtout que c'est toujours chouette de découvrir Genève au beau milieu de la nuit : un vrai désert nocturne...
Eh oui, l'accès au paradis, ça se mérite... car une fois que vous êtes en Suisse, vous aurez atteint la somme de toute chose, le grand tout, le samsara. Plus besoin de partir se baigner dans les eaux chaudes des Caraïbes, faire un city trip à Rome, explorer les châteaux Cathares, visiter les pyramides d'Egypte, les mégalithes à Stonehenge. Eh oui, il vous suffit juste d'aller à Yverdon-les-Bains, petite ville suisse du canton de Vaud au bord du lac de Neuchâtel, et dans ses environs pour trouver un condensé de toutes ces destinations de rêve que de toutes façons vous ne pourrez jamais vous offrir (enfin, je pense... C'est vrai qu'avec cette toile d'araignée mondiale, on n'est jamais à l'abri d’un milliardaire qui tomberait sur ce blog...).
Je vous sens dubitatif. Vous l'aurez voulu, voici donc la preuve en image :
Les Caraïbes sont « out of tendance », si je puis inventationner un nouveau terme. Tiens, en parlant de terme, voici les bains thermaux d'Yverdon (trop top la transition...) où vous pouvez barboter, tout comme les romains, en pleine hiver dans une piscine extérieure à 34°C d'eau naturellement sulfureuse. (http://www.cty.ch/)
Les châteaux Cathares ? De la vaste blague face au château fortifié d'Yverdon datant du 13e siècle (http://www.yverdonlesbains-tourisme.ch/f/culture/?sub=3&cat=22&id=63) :
Que dire de l'Egypte ? Trop loin, trop cher, trop de poussière. Il vous suffit d'aller voir la momie du prêtre Nesshou dans une des tours du château (http://archives.24heures.ch/VQ/LAUSANNE/-/article-2004-01-3330/la-momie-d-yverdon-devrait-bientot-feter-ses-2200-ans) :
Aller à Rome ? Trop Berlusconnienne, trop italienne et plus assez romaine, somme toute. Je vous épargne donc un voyage pénible, car sachez qu'Yverdon fut, en son temps, une cité romaine florissante du nom d'Eburodunum avec son port, son castrum, ses villas romaines, ses mosaïques :
Sans oublier les menhirs de Clendy, les cités lacustres des bords du lac de Neuchâtel, les plaines de Grandson qui bruissent encore des batailles de Charles le Téméraire (si personne ne m'arrête je vais continuer encore pendant 2 pages), Pestalozzi d'Yverdon pédagogue rousseauiste (moi je trouve ça terriblement passionnant), l'Encyclopédie d'Yverdon qui faisait brillamment écho à celle de Diderot http://encyclopedie-yverdon.org/ (ah bon, vous ne trouvez pas ça captivant ?), l'incroyable découverte du buste en or de l'empereur Marc Aurèle à Avenches http://www.avenches.ch/aventicum/fr/Musee/archives/a303/a303.htm (bon, OK, alors j'arrête.... mais à contrecoeur...) et voici 6000 ans d'histoire qui défilent sous vos yeux ébahis.
Ah, ah, je vous sens nettement moins dubitatif maintenant !
Dire que j'en connais qui parte aux Canaries (http://gwenvidik.over-blog.com/photo-1545071-2010-Canaries_0103-184527-01_jpg.html) pour ne faire « que de la navigation » et qui ont raté ce voyage unique sur 6 millénaires à Yverdon...
Ah j'oubliais : à l'aller deux valises plutôt légères remplies de quelques vêtements chauds et au retour quatre valises de 30 kg chacune remplies de cadeaux, de chocolat, de fondue, etc..., 3 bagages de cabine remplis de jouets et les poches pleines de bonbons...
Moi je vous le dis, le père Noël n'habite pas à temps plein au Pôle Nord, il a, c'est sûr, une résidence secondaire en Suisse...
Oups, j'ai juste encore un scoop de dernière minute : vous savez quoi ? La Suisse va gagner la prochaine Coupe de l'America :
Ca fait plus de 6000 ans qu'ils s'entraînent sur le lac de Neuchâtel avec du matériel de pointe...
Christel, petite maman Noël qui ne volera plus dans le ciel
P.S. : Vous croyez que j’ai un avenir comme guide à l'office du tourisme d'Yverdon ?